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[Avis] La vieille anglaise et le continent
(trop ancien pour répondre)
Nicolas Delsaux
2014-09-12 10:00:20 UTC
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La Vieille Anglaise Et Le Continent by Jeanne-A Debats

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Mass Market Paperback, 384 pages
Published March 1st 2012 by Gallimard Education
ISBN 2070440141 (ISBN13: 9782070440146)
edition language French


Je crois avoir déja dit que j'étais généralement peu fan des recueils de
nouvelles, même si ceux que j'ai lu m'ont semblé dans l'ensemble plutôt
corrects, voire parfois excellents (celui de Ian Mc Donald, par exemple).
Donc, j'ai entamé cette lecture avec un oeil plutôt circonspect qui a
s'est trouvé totalement convaincu par la première nouvelle. Je vais
d'ailleurs détailler les différentes nouvelles ...

La Vieille Anglaise et le continent
Une belle nouvelle, mêlant l'amour usuel pour les cétacés avec des
thèmes plus sombres : l'exploitation de clones comme réservoirs
d'organes (comme dans la proie des rêves) et la destruction de notre
environnement. Pour moi, le meilleur dans cette nouvelle, c'est
clairement le thème de l'intelligence cétacée, vue avec beaucoup de finesse.

Aria Furiosa
De l'amour, de l'art, des homosexuels au temps des nazis, tout cela
forme une ambiance très créupusculaire. Le traitement d'un fantastique
très léger de cette vengeance artistique est absolument spectaculaire.
Et puis d'un point de vue purement esthétique, Paris sous la botte des
nazis est une espèce de beauté morbide qui me fait toujours frémir.

Saint-Valentin
J'ai eu un peu de mal à cerner cette histoire, qui met aux prises une
femme de serial killer souhaitant une vie plus "normale" avant de se
rendre compte que la normalité est le nom de l'enfer. C'est sans doute
aprce que je sais ça que j'ai toujours du mal avec ces histoires où les
gens doivent faire l'effort de comprendre cette évidence.

Paso doble
Cette histoire de corrida futuriste fait écho à la première nouvelle,
puisqu'elle réutilise le transfert de l'âme dans un animal, cette fois
dans un but bien plus instinctif (je ne dirai pas bas, parce que je ne
crois pas que la vengeance soit plus une bassesse que nots autres
utilisations de notre état d'animal).

Stratégies du réenchantement
Le sida et sa mythologie. Ca n'est pas la première fois qu'un auteur
invente, dans une nouvelle, des déclinaisons numérotées du sida. Mais
cette fois-ci, si les variantes ne sont pas forcément covnaincantes,
l'objectif du personnage principal, qui se révèle dans une chute
abrupte, est particulièrement touchant.

Privilège insupportable
Un monde sous cloche, un personnage dont on devine rapidement qu'il est
odieux, avant de comprendre qu'il est encore plus qu'odieux. C'est sans
doute la nouvelle la plus moralement discutable, tout en étant celle qui
se rapproche le plus d'une espèce de canon post-apocalyptique.

Gilles au bûcher
Variation post-apocalyptique sur Gilles de Rais, le fameux monstre
mangeur d'enfant, qui découvre cette fois qu'il a, d'une certaine façon,
trop cultivé son amour pour oser rester un monstre. La nouvelle est
plutôt sympathique, même si la conclusion m'a paru assez moyenne,
peut-être parce que ne décidant pas vraiment d'une direction à prendre.

Fugues et fragrances au temps du Dépotoir
Peut-être ma nouvelle préférée.
L'histoire s'y déroule dans une station spatiale entourant un trou noir
instable, et le jeune personnage central se déplace dans un
environnement physiquement instable : la gravité comme le temps lui
jouent parfois des farces sinistres. ce qui n'empêche d'ailleurs pas une
certaine sensualité, ni même une cohérence de l'environement bien
supérieure au monde présenté dans "Gilles au bûcher" ou "privilège
insupportable".

Nettoyage de printemps
Un très court texte qui trahit peut-être mieux que les autres la proonde
misanthropie de l'auteur. Bravo.

Jean-Claude DUNYACH, L'Art du changement d'état, Postface
Et là, trahison, Dunyach fait preuve de ce que je ne peut que qualifier
de Lapalissade en définissant l'art de l'auteur. Que je sois bien clair
: tout ce qu'ilé crit dans cette postface porte la marque de la plus
profonde évidence : les nouvelles de Debats s'intéressent à ces moments
où le monde change, et n'observe les personnages que de façon
extérieure. Ca, je l'avais compris tout seul. Merci

Conclusion
Si la postface est ... passable, les nouvelles ne le sont pas, elles.
Quand bien même elles présentent des personnages plus que douteux
("Privilège insupportable", qui m'a vraiment rebuté moralement), elles
sont écrites avec une plume subtile, sensuelle qui a tous mes suffrages,
parce qu'elle se désintéresse des états d'âme pour mettre en valeur les
actes, et quels actes ! Tous ces personnages agissent en effet d'une
façon proprement héroïque, parce qu'ils tentent plus que tout ce que je
pourrais imaginer.
Le tout écrit sans aucune forme de pathos, ce qui m'a parfaitement
satisfait.
J'ai par ailleurs trouvé dans cette plume un peu de l'ironie de
Catherine Dufour, non pas que celle-ci ait inspiré Jeanne A Debats, mais
plutôt qu'il y a une forme de distanciation commune, une distanciation
qu'on retrouve d'ailleurs dans le personnage de l'anglaise de la
première nouvelle.
En d'autres termes, ce recuil offre une vision plutôt complète, et
particulièrement éclairante (au sens le plus philosophique du terme) du
talent de cet auteur, dont je lirai d'autres oeuvres avec plaisir.
--
Nicolas delsaux
"Putain mais quelle fichue imagination je peux avoir" - Tous à Zanzibar,
John Brunner
Laurent Tchilian
2014-09-12 20:46:41 UTC
Permalink
Salut,

Voilà tout ce qui me "gonfle" dans cette SF plein de faux sentiments. Je passe donc la vieille anglaise.

AB+ Laurent

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