Yliur
2011-08-19 02:15:58 UTC
Une présentation du cycle d'Ender (Orson Scott Card), ou du moins de ce
que j'en ai lu. Là encore il s'agit de livres que je ne viens pas de
lire, je fais une présentation de mémoire parce que je viens de lire
l'Exil et que le premier roman du cycle m'a beaucoup marqué.
Le roman d'"origine" (paru en réalité après une nouvelle du même auteur
racontant à peu près la même histoire)
- La stratégie Ender
Un roman situé "après" le premier (en fait avant la fin de ce roman,
laquelle fin se situe dans un lointain futur, comme un épilogue)
- Ender - L'exil
Une trilogie située plus tard dans la vie d'Ender
- La voix des morts
- Xénocide
- Les enfants de l'esprit
A ça il faut ajouter la Saga des ombres, dont je n'ai lu que le premier
(trois autres ont été traduits et un autre pas encore d'après
Wikipéda) :
- La stratégie de l'ombre
Et diverses nouvelles, dont certaines ont été traduites en français et
regroupées dans un recueil (ce recueil inclut apparemment la nouvelle
dont est tiré le premier roman).
La stratégie Ender
L'histoire se passe dans un futur pas vraiment immédiat mais sans être
complètement déconnecté de notre monde (d'ailleurs le bloc de l'est
existe encore, le livre date des années 80). Quelques dizaines d'années
avant le début de l'histoire, la Terre a été attaquée à deux reprises
par les Doryphores, des extraterrestres venus d'on ne sait où. Les
nations se sont unies (plus ou moins, la situation politique reste
tendue, le Pacte de Varsovie existe toujours) pour se doter d'une
flotte spatiale. Un programme de détection des jeunes génies a été mis
en place pour les sélectionner et les former à devenir les futurs
cadres de la flotte, en prévision d'une nouvelle attaque des
Doryphores. Ender est l'un de ces enfants, à la fois un génie et un
petit garçon qui pleure en quittant sa famille.
L'histoire raconte la formation d'Ender, ce petit garçon de six ans
expédié sur une station spatiale avec d'autres jeunes gens de son âge
ou plus vieux (ceux dont la formation est en cours depuis plusieurs
années). La vie s'organise entre les cours (classiques et militaires)
et l'entraînement. L'entraînement prend beaucoup de place dans la vie
de ces enfants : des batailles en "armées" (équipes) livrées en
apesanteur avec des armes paralysantes dans une salle contenant des
obstacles flottants. Les enfants vivent dans leur "armée", la cantine
(commune) contient un classement des équipes, ces batailles sont pour
eux à la fois un entraînement tactique (à combattre en groupe, à
donner/recevoir des ordres, ...), un jeu et une compétition.
Les militaires gérant le programme voient rapidement en Ender quelqu'un
de très prometteur et placent de grands espoirs en lui. Le récit tourne
essentiellement autour d'Ender, mais les chapitres commencent par des
conversations entre les responsables du programme, ce qui permet de
bien comprendre les enjeux et leurs actions, d'avoir un contre-point
plus froid à la vision d'Ender de l'histoire. Les organisateurs
décident de faire pression sur Ender, de le mettre dans des situations
difficiles pour mettre à l'épreuve ses capacités et le pousser en avant.
J'ai aimé Ender et l'émotion intense du récit, Ender tissant des liens
avec les autres enfants, se débattant dans les épreuves imposées à
travers les affrontements entre armées. La pression des organisateurs,
quasi-invisibles pour Ender, l'injustice de leurs décisions dans ce
"jeu" si important dans la vie des enfants. Les émotions de ce gamin
génial qui est un pion dans le jeu de l'armée mais qui tente d'échapper
à ce qu'on lui inflige, les liens entre les enfants et l'ambiance qui
se dégrade au fur et à mesure que la pression augmente.
Difficile de dire si on apprécie autant si on n'aime pas trop la partie
affrontements dans le "jeu" (bien que seul le premier soit un peu
détaillé, dans les suivants c'est surtout le contexte, les résultats,
les personnages et l'ambiance qui sont importants, donc je ne pense pas
que ce soit si grave même s'ils font partie de la dynamique du récit)
ou si on ne s'identifie pas au petit garçon. De mon côté j'ai vraiment
beaucoup aimé le livre et le petit garçon :) . Je pense que les adeptes
de la saga Vorkosigan devraient retrouver avec plaisir un personnage
bouillonnant et charismatique. Avec quelques différences : Ender est
plus jeune, plus calme et réfléchi et plus pris dans des manipulations
(même s'il se débat intensément dans le filet), là où Miles est plus
emporté, a plus de responsabilités et est intenable (surtout parce
qu'il n'est pas un petit garçon manipulé mais quelqu'un de plus
autonome).
Ender - L'exil
Un peu difficile de détailler ce roman sans rien indiquer de la fin du
précédent, l'histoire se situant avant le dernier chapitre de celui-ci
(qui dévoile l'avenir d'Ender). Je vais simplement tâcher de donner mon
impression par rapport aux autres pour ceux qui ont lu La stratégie
Ender, l'Exil n'ayant de toute manière pas réellement d'intérêt si on
n'a pas lu le précédent.
L'histoire se situe après le gros de l'histoire du premier roman :
Ender ne peut rentrer sur Terre à cause de l'enjeu qu'il représente (un
commandant militaire reconnu) dans les affrontements entre nations à
deux doigts de reprendre. Il est donc nommé gouverneur de la première
colonie humaine en dehors de la Terre. Le récit évoque l'avenir de
certain des compagnons d'Ender, a priori développé dans la Saga des
ombres (les livres que je n'ai pas lus). L'essentiel de l'histoire se
passe sur le vaisseau qui transporte Ender et les colons, puis sur la
colonie. On retrouve l'attachement de l'auteur aux relations humaines
et l'émotion qui affleure, Ender le manipulateur et sa lutte
d'influence contre le commandant du vaisseau, le début de la mauvaise
réputation d'Ender sur Terre et ses tentatives pour lutter contre ce
phénomène, l'écriture de La Reine et l'Hégémon, textes fondateurs de
l'espèce de religion future d'Ender, ... bref, les liens entre le gros
de La stratégie Ender d'une part et son dernier chapitre et la trilogie
qui suit d'autre part.
Le récit est agréable et j'ai retrouvé avec plaisir Valentine et Ender,
avec son air de petit garçon mais qui a toujours calculé les situations
pour arriver à ses fins. Et même Graff, le commandant de la station de
formation du premier roman. Le récit n'est cependant pas au même niveau
d'intensité que le roman précédent, il faut avoir un peu envie de lire
cette transition entre La stratégie Ender et la trilogie qui suit, le
devenir des personnages du premier roman, ... Bon, elle a l'air
méchante cette derinère phrase... Disons que j'ai quand même apprécié
le récit, mais je ne classerais pas ça dans une liste de romans
indispensables. Après quand on aime Ender (oui, oui, vraiment, on peut
aimer réellement ce petit garçon), on apprécié quelques moments de plus
passés en sa compagnie :) .
La stratégie de l'ombre
Je place ce court avis ici parce que le livre raconte en partie la même
histoire que La stratégie Ender mais du point de vue d'un autre
personnage. Le récit dévoile la jeunesse de Bean, petit garçon très
intelligent qui a grandi dans la rue dans un contexte difficile,
jusqu'à sa rencontre avec Ender et leur histoire commune sur la station
de formation, les deux romans se terminant à peu près au même moment.
Je trouve l'exercice assez réussi : on retrouve une partie de La
Stratégie Ender, mais une partie seulement parce que Bean est un petit
garçon qui a vécu dans un univers dangereux et n'a survécu qu'en
devenant très froid et très calculateur. Et ça se ressent dans la
manière dont c'est écrit : là où La stratégie Ender est un récit tout
en émotion, La stratégie de l'ombre est plus froid dans l'écriture :
par exemple quand Bean arrive dans un endroit, il le décrit et liste
les chemins qu'il pourrait utiliser pour s'échapper en cas de besoin.
Le récit n'est pas totalement froid et on retrouve une partie du roman
frère, mais l'écriture est assez différente. Ce livre peut très bien
être lu indépendamment du premier roman et introduit la saga des
ombres, qui raconte la suite de l'histoire de Bean et des personnages
restés sur Terre (notamment les autres compagnons d'Ender et son frère
Peter).
La "trilogie de Lusitania"
Non, ce n'est pas un nom officiel, mais l'action tourne autour de cette
planète et je n'avais pas de meilleur nom.
L'histoire se passe (très) longtemps après les précédents romans. Ender
et sa soeur Valentine ont erré à travers l'univers connu, passant d'une
planète à une autre, restant quelques années puis reprenant leur route.
L'éloignement des planètes et les effets du voyage relativiste font
qu'Ender et Valentine doivent avoir une trentaine d'années au début du
récit, alors que quelques trois mille ans se sont écoulés pour le reste
de l'univers.
Ender est devenu une sorte de prêtre/philosophe. Il est Porte-Parole
des Morts : il est appelé pour parler au moment de l'enterrement d'un
individu pour s'exprimer sur sa vie, non pas une éloge sur le mort mais
simplement la vérité qui doit être dite. Ender est un Porte-Parole des
Morts célèbre et est appelé pour le même mort mais indépendamment par
deux jeunes gens impliquées dans la même histoire tragique sur un autre
monde. Ender décide de se rendre sur ce monde, ce qui signifie qu'il
arrive une trentaine d'années après les événements et tente de faire la
lumière sur ce qui s'est passé.
La planète en question est Lusitania, qui a la particularité d'abriter
la seule autre forme de vie intelligente connue de l'humanité : les
pequeninos ressemblent vaguement à des cochons et ont une technologie
primitive, mais sont considérés comme une espèce intelligente et sont
un sujet d'étude pour la colonie humaine implantée sur la planète.
Ender va devoir démêler les fils du drame survenu des décennies
auparavant, entre sombres histoires de famille et tentatives de
communication avec une espèce non-humaine, qui a manifestement
assassiné un des scientifiques chargé de les étudier (celui pour lequel
Ender vient parler).
Dans les deuxième et troisième tome, Le Congrès Stellaire, sorte de
gouvernement universel des humains décide de détruire Lusitania à cause
d'une terrible menace qui l'habite et qui menace de se répandre dans
l'univers et de décimer les humains : la descoldada est une sorte de
parasite qui a tué de nombreux humains sur Lusitania et dont l'action
n'est contenue que grâce aux recherches continues des scientifiques de
la colonie pour adpater les traitements à ses évolutions. Sur fond de
lutte d'influence contre le Congrès, ces deux livres s'attachent plus
aux réflexions sur le monde, les cultures et les religions (le récit
n'est pas anti-religieux, mais on voit apparaître les grosses ficelles
qui peuvent lier la politique à la religion), aux questions sur
l'intelligence, la légimité de détruire une espèce intelligente si on
n'est pas capable de communiquer avec elle et que l'espèce humaine est
menacée, à la priorité à donner ou non aux colons humains (qui ne
constituent qu'une partie de l'humanité) sur les pequeninos si un des
deux groupes doit être sacrifié. L'auteur développe une
"théorie" (fictive) sur ce qu'on pourrait appeler l'âme, un concept qui
relie les différentes formes d'intelligence présentées.
En filigrane les récits font apparaître différentes formes
d'intelligence et les difficultés à communiquer avec elle : les
humains, les pequeninos, les doryphores, la descolada (intelligente ?)
et une IA qui réside dans le réseau de communication universel des
humain et se présente comme une personne à Ender.
Le premier roman de cette trilogie est encore assez porté sur
l'émotion, pas sous la forme bouillante de La stratégie Ender mais plus
dans les personnages principaux tourmentés, pris dans les anciennes
histoires douloureuses et leurs passions pour l'étude et la
communication avec les pequeninos pour certains, les réflexions et les
déchirements sur la conduite à tenir vis-à-vis des autres espèces
intelligentes (pour ce dernier point ça s'étale sur les trois romans).
Et surtout dans l'empathie d'Ender, qui parvient à aimer et comprendre
ces gens et leurs douleurs (je ne sais pas comment expliquer ça, mais
la lecture des moments où Ender comprend ces gens et le manifeste,
parfois libère leurs esprits des douleurs accumulées, m'a beaucoup
touché).
Les deux autres romans sont plus portés sur les autres sujets évoqués,
mais on ne peut pas vraiment les lire séparément (en fait on peut quand
même se contenter de lire le premier des trois parce que l'essentiel de
son histoire est terminée, même si une partie est toujours en suspens ;
les deux récits suivants sont plus liés). Les thèmes et questions
abordés sont intéressants et donnent lieu à des discussions parfois
enflammées entre les personnages, mais en contrepartie les récits plus
lents (j'ai d'ailleurs retenu les thèmes et réflexions beaucoup plus
que les détails de l'histoire).
Yliur
que j'en ai lu. Là encore il s'agit de livres que je ne viens pas de
lire, je fais une présentation de mémoire parce que je viens de lire
l'Exil et que le premier roman du cycle m'a beaucoup marqué.
Le roman d'"origine" (paru en réalité après une nouvelle du même auteur
racontant à peu près la même histoire)
- La stratégie Ender
Un roman situé "après" le premier (en fait avant la fin de ce roman,
laquelle fin se situe dans un lointain futur, comme un épilogue)
- Ender - L'exil
Une trilogie située plus tard dans la vie d'Ender
- La voix des morts
- Xénocide
- Les enfants de l'esprit
A ça il faut ajouter la Saga des ombres, dont je n'ai lu que le premier
(trois autres ont été traduits et un autre pas encore d'après
Wikipéda) :
- La stratégie de l'ombre
Et diverses nouvelles, dont certaines ont été traduites en français et
regroupées dans un recueil (ce recueil inclut apparemment la nouvelle
dont est tiré le premier roman).
La stratégie Ender
L'histoire se passe dans un futur pas vraiment immédiat mais sans être
complètement déconnecté de notre monde (d'ailleurs le bloc de l'est
existe encore, le livre date des années 80). Quelques dizaines d'années
avant le début de l'histoire, la Terre a été attaquée à deux reprises
par les Doryphores, des extraterrestres venus d'on ne sait où. Les
nations se sont unies (plus ou moins, la situation politique reste
tendue, le Pacte de Varsovie existe toujours) pour se doter d'une
flotte spatiale. Un programme de détection des jeunes génies a été mis
en place pour les sélectionner et les former à devenir les futurs
cadres de la flotte, en prévision d'une nouvelle attaque des
Doryphores. Ender est l'un de ces enfants, à la fois un génie et un
petit garçon qui pleure en quittant sa famille.
L'histoire raconte la formation d'Ender, ce petit garçon de six ans
expédié sur une station spatiale avec d'autres jeunes gens de son âge
ou plus vieux (ceux dont la formation est en cours depuis plusieurs
années). La vie s'organise entre les cours (classiques et militaires)
et l'entraînement. L'entraînement prend beaucoup de place dans la vie
de ces enfants : des batailles en "armées" (équipes) livrées en
apesanteur avec des armes paralysantes dans une salle contenant des
obstacles flottants. Les enfants vivent dans leur "armée", la cantine
(commune) contient un classement des équipes, ces batailles sont pour
eux à la fois un entraînement tactique (à combattre en groupe, à
donner/recevoir des ordres, ...), un jeu et une compétition.
Les militaires gérant le programme voient rapidement en Ender quelqu'un
de très prometteur et placent de grands espoirs en lui. Le récit tourne
essentiellement autour d'Ender, mais les chapitres commencent par des
conversations entre les responsables du programme, ce qui permet de
bien comprendre les enjeux et leurs actions, d'avoir un contre-point
plus froid à la vision d'Ender de l'histoire. Les organisateurs
décident de faire pression sur Ender, de le mettre dans des situations
difficiles pour mettre à l'épreuve ses capacités et le pousser en avant.
J'ai aimé Ender et l'émotion intense du récit, Ender tissant des liens
avec les autres enfants, se débattant dans les épreuves imposées à
travers les affrontements entre armées. La pression des organisateurs,
quasi-invisibles pour Ender, l'injustice de leurs décisions dans ce
"jeu" si important dans la vie des enfants. Les émotions de ce gamin
génial qui est un pion dans le jeu de l'armée mais qui tente d'échapper
à ce qu'on lui inflige, les liens entre les enfants et l'ambiance qui
se dégrade au fur et à mesure que la pression augmente.
Difficile de dire si on apprécie autant si on n'aime pas trop la partie
affrontements dans le "jeu" (bien que seul le premier soit un peu
détaillé, dans les suivants c'est surtout le contexte, les résultats,
les personnages et l'ambiance qui sont importants, donc je ne pense pas
que ce soit si grave même s'ils font partie de la dynamique du récit)
ou si on ne s'identifie pas au petit garçon. De mon côté j'ai vraiment
beaucoup aimé le livre et le petit garçon :) . Je pense que les adeptes
de la saga Vorkosigan devraient retrouver avec plaisir un personnage
bouillonnant et charismatique. Avec quelques différences : Ender est
plus jeune, plus calme et réfléchi et plus pris dans des manipulations
(même s'il se débat intensément dans le filet), là où Miles est plus
emporté, a plus de responsabilités et est intenable (surtout parce
qu'il n'est pas un petit garçon manipulé mais quelqu'un de plus
autonome).
Ender - L'exil
Un peu difficile de détailler ce roman sans rien indiquer de la fin du
précédent, l'histoire se situant avant le dernier chapitre de celui-ci
(qui dévoile l'avenir d'Ender). Je vais simplement tâcher de donner mon
impression par rapport aux autres pour ceux qui ont lu La stratégie
Ender, l'Exil n'ayant de toute manière pas réellement d'intérêt si on
n'a pas lu le précédent.
L'histoire se situe après le gros de l'histoire du premier roman :
Ender ne peut rentrer sur Terre à cause de l'enjeu qu'il représente (un
commandant militaire reconnu) dans les affrontements entre nations à
deux doigts de reprendre. Il est donc nommé gouverneur de la première
colonie humaine en dehors de la Terre. Le récit évoque l'avenir de
certain des compagnons d'Ender, a priori développé dans la Saga des
ombres (les livres que je n'ai pas lus). L'essentiel de l'histoire se
passe sur le vaisseau qui transporte Ender et les colons, puis sur la
colonie. On retrouve l'attachement de l'auteur aux relations humaines
et l'émotion qui affleure, Ender le manipulateur et sa lutte
d'influence contre le commandant du vaisseau, le début de la mauvaise
réputation d'Ender sur Terre et ses tentatives pour lutter contre ce
phénomène, l'écriture de La Reine et l'Hégémon, textes fondateurs de
l'espèce de religion future d'Ender, ... bref, les liens entre le gros
de La stratégie Ender d'une part et son dernier chapitre et la trilogie
qui suit d'autre part.
Le récit est agréable et j'ai retrouvé avec plaisir Valentine et Ender,
avec son air de petit garçon mais qui a toujours calculé les situations
pour arriver à ses fins. Et même Graff, le commandant de la station de
formation du premier roman. Le récit n'est cependant pas au même niveau
d'intensité que le roman précédent, il faut avoir un peu envie de lire
cette transition entre La stratégie Ender et la trilogie qui suit, le
devenir des personnages du premier roman, ... Bon, elle a l'air
méchante cette derinère phrase... Disons que j'ai quand même apprécié
le récit, mais je ne classerais pas ça dans une liste de romans
indispensables. Après quand on aime Ender (oui, oui, vraiment, on peut
aimer réellement ce petit garçon), on apprécié quelques moments de plus
passés en sa compagnie :) .
La stratégie de l'ombre
Je place ce court avis ici parce que le livre raconte en partie la même
histoire que La stratégie Ender mais du point de vue d'un autre
personnage. Le récit dévoile la jeunesse de Bean, petit garçon très
intelligent qui a grandi dans la rue dans un contexte difficile,
jusqu'à sa rencontre avec Ender et leur histoire commune sur la station
de formation, les deux romans se terminant à peu près au même moment.
Je trouve l'exercice assez réussi : on retrouve une partie de La
Stratégie Ender, mais une partie seulement parce que Bean est un petit
garçon qui a vécu dans un univers dangereux et n'a survécu qu'en
devenant très froid et très calculateur. Et ça se ressent dans la
manière dont c'est écrit : là où La stratégie Ender est un récit tout
en émotion, La stratégie de l'ombre est plus froid dans l'écriture :
par exemple quand Bean arrive dans un endroit, il le décrit et liste
les chemins qu'il pourrait utiliser pour s'échapper en cas de besoin.
Le récit n'est pas totalement froid et on retrouve une partie du roman
frère, mais l'écriture est assez différente. Ce livre peut très bien
être lu indépendamment du premier roman et introduit la saga des
ombres, qui raconte la suite de l'histoire de Bean et des personnages
restés sur Terre (notamment les autres compagnons d'Ender et son frère
Peter).
La "trilogie de Lusitania"
Non, ce n'est pas un nom officiel, mais l'action tourne autour de cette
planète et je n'avais pas de meilleur nom.
L'histoire se passe (très) longtemps après les précédents romans. Ender
et sa soeur Valentine ont erré à travers l'univers connu, passant d'une
planète à une autre, restant quelques années puis reprenant leur route.
L'éloignement des planètes et les effets du voyage relativiste font
qu'Ender et Valentine doivent avoir une trentaine d'années au début du
récit, alors que quelques trois mille ans se sont écoulés pour le reste
de l'univers.
Ender est devenu une sorte de prêtre/philosophe. Il est Porte-Parole
des Morts : il est appelé pour parler au moment de l'enterrement d'un
individu pour s'exprimer sur sa vie, non pas une éloge sur le mort mais
simplement la vérité qui doit être dite. Ender est un Porte-Parole des
Morts célèbre et est appelé pour le même mort mais indépendamment par
deux jeunes gens impliquées dans la même histoire tragique sur un autre
monde. Ender décide de se rendre sur ce monde, ce qui signifie qu'il
arrive une trentaine d'années après les événements et tente de faire la
lumière sur ce qui s'est passé.
La planète en question est Lusitania, qui a la particularité d'abriter
la seule autre forme de vie intelligente connue de l'humanité : les
pequeninos ressemblent vaguement à des cochons et ont une technologie
primitive, mais sont considérés comme une espèce intelligente et sont
un sujet d'étude pour la colonie humaine implantée sur la planète.
Ender va devoir démêler les fils du drame survenu des décennies
auparavant, entre sombres histoires de famille et tentatives de
communication avec une espèce non-humaine, qui a manifestement
assassiné un des scientifiques chargé de les étudier (celui pour lequel
Ender vient parler).
Dans les deuxième et troisième tome, Le Congrès Stellaire, sorte de
gouvernement universel des humains décide de détruire Lusitania à cause
d'une terrible menace qui l'habite et qui menace de se répandre dans
l'univers et de décimer les humains : la descoldada est une sorte de
parasite qui a tué de nombreux humains sur Lusitania et dont l'action
n'est contenue que grâce aux recherches continues des scientifiques de
la colonie pour adpater les traitements à ses évolutions. Sur fond de
lutte d'influence contre le Congrès, ces deux livres s'attachent plus
aux réflexions sur le monde, les cultures et les religions (le récit
n'est pas anti-religieux, mais on voit apparaître les grosses ficelles
qui peuvent lier la politique à la religion), aux questions sur
l'intelligence, la légimité de détruire une espèce intelligente si on
n'est pas capable de communiquer avec elle et que l'espèce humaine est
menacée, à la priorité à donner ou non aux colons humains (qui ne
constituent qu'une partie de l'humanité) sur les pequeninos si un des
deux groupes doit être sacrifié. L'auteur développe une
"théorie" (fictive) sur ce qu'on pourrait appeler l'âme, un concept qui
relie les différentes formes d'intelligence présentées.
En filigrane les récits font apparaître différentes formes
d'intelligence et les difficultés à communiquer avec elle : les
humains, les pequeninos, les doryphores, la descolada (intelligente ?)
et une IA qui réside dans le réseau de communication universel des
humain et se présente comme une personne à Ender.
Le premier roman de cette trilogie est encore assez porté sur
l'émotion, pas sous la forme bouillante de La stratégie Ender mais plus
dans les personnages principaux tourmentés, pris dans les anciennes
histoires douloureuses et leurs passions pour l'étude et la
communication avec les pequeninos pour certains, les réflexions et les
déchirements sur la conduite à tenir vis-à-vis des autres espèces
intelligentes (pour ce dernier point ça s'étale sur les trois romans).
Et surtout dans l'empathie d'Ender, qui parvient à aimer et comprendre
ces gens et leurs douleurs (je ne sais pas comment expliquer ça, mais
la lecture des moments où Ender comprend ces gens et le manifeste,
parfois libère leurs esprits des douleurs accumulées, m'a beaucoup
touché).
Les deux autres romans sont plus portés sur les autres sujets évoqués,
mais on ne peut pas vraiment les lire séparément (en fait on peut quand
même se contenter de lire le premier des trois parce que l'essentiel de
son histoire est terminée, même si une partie est toujours en suspens ;
les deux récits suivants sont plus liés). Les thèmes et questions
abordés sont intéressants et donnent lieu à des discussions parfois
enflammées entre les personnages, mais en contrepartie les récits plus
lents (j'ai d'ailleurs retenu les thèmes et réflexions beaucoup plus
que les détails de l'histoire).
Yliur